Une rue de Niederbronn
porte le nom de CHARLES MATTHIS.
L'impact de ce dernier sur l'avancée de
l'histoire locale ne fait aucun doute...
Ses découvertes sont citées dans de nombreuses publications et c'est une
référence pour le musée niederbronnois (dans la Maison de l'Archéologie des
Vosges du Nord).
Nous donnerons encore d'autres détails moins connus sur cette page.
Mais avant tout, revenons au nom de MATTHIS, célèbre dans la région
alsacienne mais qui prête à confusion.
Historien-archéologue diront certains, constructeur automobile rétorqueront
d'autres, voire poète ou peintre...
Certes, c'est exact... mais il s'agit de personnes différentes, ayant
d'ailleurs toutes vécues entre le XIXe et le XXe siècle.
CLARIFICATION
CHARLES MATTHIS
(avec deux
T), cette personnalité de Niederbronn est un hôtelier qui se passionne pour
l'histoire.
Il est né en
1851 à Gerstheim (son père Frédéric, passionné de généalogie, y était meunier. Sa mère Sophie Zeyssolf
décède en 1862, laissant 4 enfants, Charles étant le plus jeune).
Il rejoint Niederbronn où sa tante l'élève (détails supplémentaires infra).
Le père de Charles étant veuf, il se remarie... Il a trois autres enfants
dont
ALBERT et ADOLPHE
MATTHIS
Photo1910 supposé
Ce sont des jumeaux nés en 1874.
Les fameux frères Matthis réputés dans toute l'Alsace pour leurs écrits
poétiques en dialecte !
Ils ont leur place dans l'évolution de la littérature
régionale.
En tant que demi-frères de
Charles, ils viennent parfois de Strasbourg pour séjourner à Niederbronn
et participer à des fêtes familiales; voire en convalescence.
. Les relations sont chaleureuses. Des
poèmes font allusion à ces moments forts
En feuilletant leurs
ouvrages publiés ou en fouillant dans le passionnant
catalogue provisoire
des manuscrits (dont généalogie et correspondances) et poèmes des frères Matthis
conservés dans le fonds Matthis légué
par leur ami, Alfred Schlagdenhauffen à la BNU de Strasbourg,
on trouve des titres comme :
E Schlittebardhie vun
Niederbrunn in’s
Jäjerthal am 26 December - 1896
(une virée en traîneau de Niederbronn à Jaegerthal.
Poème d'Albert visible dans le livre Ziwwelbaamholz)
In der Wachtstubb vun de Bumbié,
(en direct de la "caserne" des pompiers; écrit à Niederbronn
le 20 août 1902)
D’ Hochzitt in
Niederbrunn,
avec une dédicace : à Charles et Mina au
jour de la noce de Berthe Matthis
(il s'agit d'un poème d'Adolphe pour le mariage de leur nièce Berthe,
la fille de Charles - Février 1912
Il est visible dans le livre Fülefüte et Bissali)
Fur d'Niederbrunner Kinddaif
(donc inspirés par un baptême à Niederbronn - Enfant de Berthe.
Petit-enfant de Charles - 29 décembre1912)
Am Confirmationsdaa (Niederbrunn)
(jour de la Confirmation)
E Kraenzel fur s’silwericht
Hochzitt vum
Berthe un vum Auguste in Niederbrunn, daté "Hornung 1935"
(nota bene : Hornung représente le mois de février.
Les noces d'argent - 1937 - de la fameuse Berthe et de son mari Auguste semblent
en préparation)
D'r ald Forschter vum
Heidekopf
(Il est visible dans le livre Bissali)
Rajoutons un poème qui rend également hommage à Niederbronn,
en particulier au château du Wasenbourg (à l'aurore) : D'Waseburri im Morjerot,.
On retrouve cet écrit à
trois reprises dans les ouvrages des frères Matthis : en 1901 dans Ziwwelbaamholz,
en 1937 dans Fülefüte, en 1958 dans Bissali.
Ci-dessous, une version initiale du texte (source : Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg /
ark:/12148/bpt6k9400904j/f1).
Présenté et illustré avec goût, il date de juillet 1900. Il est écrit par Albert à 26 ans
(Charles est alors âgé de 49 ans)
La faune, la flore... et les Romains y sont bien entendu évoqués !
On relèvera la dédicace "à
mon cher frère Charles"
:
Nous avons remarqué la photo
encadrée artistiquement, à gauche du poème. Ci-dessous, zoom sur le
groupe devant le Wasenbourg,
(on verra plus bas que Charles Matthis y a fait des fouilles bien avant, en 1887 et
y a découvert des
vestiges du temple de Mercure).
Sur la photo, (en comparant à d'autres photos) : probablement Charles debout,
Albert et Adolphe Matthis contre l'arbre
et un autre compagnon de route (de
la famille ? Le frère aîné de Charles ?) assis.
Il y a un air de famille entre
les quatre (peut-être s'agit-il d'ailleurs d'un montage avec Charles
représenté plusieurs fois ??);
difficulté à les
distinguer aussi car tous portent la moustache (et le béret) comme souvent à cette époque.
Ci-dessous, une photo
actuelle du Wasenbourg...
L'arbre a disparu, mais on reconnaît aisément
l'endroit où les protagonistes ont posé en 1900.
.
Suit une carte
postale datant également de 1900 et dessinée par Emile Wagner.
On y voit une partie de l'intérieur du château familière à tous les
visiteurs actuels.
L'échelle (dangereuse) a disparu depuis !
Il existe aussi un autre
poème des frères Matthis, datant de 1901 qui évoque une nuit au Wasenberg (E Naacht uff’m
Waseberri)
Il faut préciser aussi que
certains écrits d'Albert essentiellement étaient parfois publiés dans le... Niederbronner Kantonalblatt :
Wyhnaachte am Waseberri
(1902. Toujours le mont du Wasenberg... où l'on retrouve le
château, la Wasenbourg. Cette fois à
Noël...)
Vun Niederbrunn üewer de Berri
in’s Baeredhal (1901)
E Summermorje im
Niederbrunner-Baad (texte en prose de juillet 1902)
D’r Waddel (texte
en prose du 13 septembre 1902)
Niederbrunner Bad-Saison
Ce périodique dans lequel
les frères Matthis publiaient parfois en langue allemande a paru durant deux décennies,
entre octobre 1897 et février 1916.
Il relatait des informations concernant Niederbronn et son canton sous la direction
d'Emil Ehrjam
Niederbronner Anzeiger für die Kantone Niederbronn-Reichshofen,
Hagenau, Bitsch und Wörth
En suppléments paraissaient "Unser Elsass" et :"Landwirtschaftliches
Centralblatt".
Culture, agriculture étaient mêlés.
Encore un détail
passionnant sur Niederbronn, un trésor d'informations à mettre au jour
pour donner une dimension supplémentaire au passé de la ville et pour mieux
comprendre son évolution.
Ce périodique est consultable sur place à la BNU de Strasbourg.
Dans l'inventaire sommaire
provisoire des textes publiés par les frères Matthis,
on peut encore signaler
une plaquette datant de 1912 qui évoque les Niederbronnois : D’Niederbrunner.
Albert meurt en 1930 et Adolphe en 1944.
Une exposition
(sous la responsabilité du Commissaire général : François Pétry) leur
a été consacrée à Strasbourg en 2006..
Lire
également l'article détaillé dans l'annuaire Regards sur l'histoire-2017 de la SHARE
(sorti le 22 mars 2017)
Voir ici
pour commandes
Albert et Adolphe Matthis font partie intégrante de ceux qui
ont contribué à la littérature alsacienne. On trouvera un chapitre qui leur
est consacré, entre Gustave Stoskopf et Albert Schweitzer, dans les deux
ouvrages Allerlei (Florilège de littérature alsacienne pour les sections
Langue et Culture Régionales / 31 auteurs du IXe siècle à nos
jours / Coordination Jean-Claude Graeff et Jean-Claude Schwendemann /
Responsable d'édition : Yves Schneider / Réalisation graphique Bettina Muller
/ Suivi de production : Elisabeth Messmer Hitzke).
Pour élèves, professeurs et tout public intéressé par ce sujet.
La publication en 1934
d'Albert Schlagdenhauffen,
docteur ès Lettres Université de Paris et qui a été leur ami, reste une
référence.
Nota
bene : une présentation générale ainsi qu'une partie des textes poétiques et en prose écrits par les frères Matthis
/ Vosges du Nord,
sont réunies dans un ouvrage de 100 pages de 2016 ; réservé à tous ceux qui en avaient fait la demande et accordé de l'intérêt
à ce sujet en 2015 + BNUS.
Maintenant que les liens
entre Charles Matthis et ses deux demi-frères Albert et Adolphe sont
clarifiés, passons à un autre Mathis réputé.
EMILE MATHIS. Son nom comporte un seul T.
Ses deux autres prénoms sont Ernest et Charles (sic).
Il est né à Strasbourg en 1880, fils d'hôtelier strasbourgeois,
responsable commercial des Automobiles De Dietrich.
(et là parenthèse pour signaler qu'ETTORE
BUGATTI conçoit et réalise une voiture qui est présentée en 1900
au Salon international de l’automobile de Milan et qui lui vaudra le Grand
Prix de la ville de Milan ainsi que le Prix d’encouragement du Club automobile
de France. C’est cette voiture qui attire l’attention du baron De Dietrich
qui le convie pour travailler à Niederbronn.
Ettore Bugatti a alors 19 ans et rejoint notre commune pour travailler à
la conception d'autres véhicules.
Il fait la connaissance de notre fameux Emile
Mathis et travaille avec lui ici de 1902 à 1904.
Ils font également la Raid Paris-Madrid ensemble. De Dietrich
arrête la fabrication automobile en 1905 (les descendants de la famille
de Dietrich possèdent encore des modèles de ces anciennes voitures).
Emile et Ettore partent et
s'associent. Voir lien Wiki.
Ce qu'on sait moins c'est
qu' Emile Mathis est aussi le premier
sponsor du Racing Club de Strasbourg professionnel dans les années 30 !! et
Président d'honneur !
Lien
Il meurt en 1956.
Mais ne le confondons pas
avec CHARLES-EMILE MATTHIS (1838-1893),
peintre illustrateur
(auteur notamment du tableau "La légende du semeur de chanvre"
exposé au Musée alsacien de Haguenau)
ni avec un autre peintre alsacien ADOLPHE MATHIS né
en 1873 ou HANS MATHIS né en 1882.
Artistes qui ont comme homonyme le célèbre (Henri) Matisse !
Revenons
sur nos pas... et reparlons de notre fameux Charles MATTHIS. Il rejoint
définitivement Niederbronn en prenant la direction de l'hôtel de son oncle en
1877 (La Chaîne d'Or)
qui est un établissement de bains privés, à l'emplacement-même où
le Comte de Hanau avait créé le sien...
Le Comte qui avait été à
l'origine du curage des bassins et donc de la découverte des monnaies
romaines...
(Il devait régner dans cet établissement une aura archéologique !)
Charles rachète aussi deux autres bâtiments et crée un établissement à son nom
(qui donne sur le Parc des Thermes. Actuellement, centre de rééducation
fonctionnelle).
Il publie des guides pour
vanter les attraits de Niederbronn dont celui de 1887 : Niederbronn
et ses environs - Nouveau guide du Baigneur et du Touriste
qu'il est encore très intéressant de parcourir.
Il est aussi à l'origine de la section locale du Club Vosgien
(Niederbonn-Reichshoffen).
Il
s'investit de plus en plus dans l'histoire locale, jusqu'à sa mort, le 1er
janvier 1925 à Niederbronn.
Mais c'est dès sa jeunesse,
en rendant visite à sa tante niederbronnoise avec sa mère, puis en vivant chez
elle quand sa mère décède,
que Charles Matthis a été marqué par
les empreintes du passé
dont regorgent les Vosges du Nord :
La Préhistoire de
Niederbronn (Alsace).
In : Bulletin de la Société préhistorique de France. 1911,
tome 8, N. 7. pp. 441-453.
Extrait du document / doi : 10.3406/bspf.1911.6297
Source : Persée
Des érudits de la région, comme Schoepflin, Oberlin,
Shweighaeuser, Siffer... avaient déjà notifié la diversité archéologique de
la commune
et les nombreuses antiquités romaines, certaines sauvegardées, d'autres
disparues. Voir
par exemple à ce sujet la
page de B. Schmitt
Charles Matthis est à l'origine d'autres découvertes archéologiques,
notamment préhistoriques mais aussi romaines et médiévales,
à Niederbronn et aux alentours,
Dans le même bulletin
que supra,
il signale encore plusieurs détails importants :
Remarque
:
Jules Quicherat est un directeur de l'Ecole des chartes.
Il se trouvait d'ailleurs sur les lieux du nouveau tracé du chemin de fer
Niederbonn-Bitche en août 1968
Grâce à son intérêt, sa
curiosité, son obstination, l'étude approfondie d'objets et d'anciens
documents, de constats sur le terrain, de fouilles,
l'histoire locale a pu évoluer sensiblement en s'enrichissant de précieux
détails et objets.
Les investigations et
conclusions sont méticuleusement et patiemment notées; des dessins, des
schémas, des cartes viennent enrichir ses données.
Voir par exemple un plan d'ensemble des cupules, intéressant également pour le
nom des lieux-dits : ICI.
Ou encore la carte détaillée de Niederbronn et environs avec légende
concernant les carrières, les sites romains : ICI
Certains de ses manuscrits sont publiés (livres, bulletins de société
d'histoire, Journal d'Alsace et de Lorraine...)
Titre : Mercurbilder aus Stein
Auteur : Manias, Jules
Éditeur : Beust L (Strassburg)
Date d'édition : 1912
Charles Matthis s'exprime aussi bien en français qu'en
allemand.
Bilan des sociétés
auxquelles il appartenait et de ses principales publications
sur le site du comité des travaux historiques et scientifiques : ICI
Cependant,
il a dû parfois se battre pour se faire admettre et reconnaître auprès
d'autres scientifiques ou historiens titrés
ou pour mettre en valeur certaines découvertes
Les Mégalithes à
cupules, écuelles et bassins dans les Vosges.
In : Bulletin de la Société préhistorique de France.
, tome 32, N. 7-8. pp. 399-402.
Schaudel Louis
1935
doi : 10.3406/bspf.1935.6132
Source : Persée
Son
expérience lui a montré qu'il était impératif de préserver les vestiges offerts comme un
trésor du passé
Il est
aussi arrivé que d'autres essayent de s'arracher la primeur d'une découverte
Découvertes d'une
grande enceinte près de Niederbronn
Bulletin de la Société préhistorique de France 1918
/ Tome 15
doi : 10.3406/bspf.1918.11947/ Persée
Encore
quelques notes intéressantes dans le Bulletin archéologique du Comité des
travaux historiques et scientifiques - Paris / 1921
Source : BNF / ark:/12148/cb327170958/date
Charles
Matthis transmet sa passion et des documents à Adolphe Malye, instituteur
protestant de l'école des garçons et passionné d'histoire,
à l'esprit ouvert, créateur de la Société philomatique de Niederbronn.
La
disparition de Charles Matthis,le 1er janvier 1925
Université de Strasbourg
/ Faculté des lettres - 1925
Après
sa disparition
Où l'on reparle du
fameux temple octogonal... à découvrir...
Annales de l'Est
Auteur : Université de Nancy. Faculté des lettres et sciences
humaines
Auteur : Fédération historique lorraine
Éditeur : Berger-Levrault (Paris)
Date d'édition : 1910
Identifiant : ark:/12148/cb34378086c/date
Source : gallica. Bibliothèque nationale de France
On trouvera
d'autres extraits de publications de Charles Matthis au gré des pages netcomete
sur Niederbronn
(exemples : Camp
celtique, Rocher de la Liese,
Elfengarten-Hexenplaetzel-Grabenfeld
Wasenbourg, Thermes).
Je vous
invite également à lire ces
trois pages sur la découverte de Charles Matthis juste au moment de la
Première Guerre mondiale.
Bien
entendu, n'hésitez plus à faire un tour au Musée archéologique
(Maison archéologique des Vosges du Nord - 44 Avenue Foch à Niederbronn).
Si la carte
ci-dessous (source DRAC) apparaît dans le nouveau PLU de la commune,
on peut encore rendre hommage à Charles Matthis, à Pascal Prévost-Bouré
et à tous ceux qui respectent les découvertes.
Encore
quelques détails.
- Charles Matthis a été
nommé à juste titre Chevalier de la légion d'honneur.
- Les colonnes du temple sur
Wachtfels à côté du Wasenbourg ne sont pas à l'origine sur ce rocher de guet romain
mais
ont été trouvées au château (emplacement dédié à Mercure) puis déplacées et rajoutées par Charles
Matthis (ce sujet a évidemment créé une polémique);
toujours est-il que ce sont des vestiges romains.
- Il existe un
"Charles Matthis" de l'histoire locale haguenovienne : André
Wagner
- Si Charles Matthis était
encore en vie, on le trouverait actuellement au centre ville à suivre les
fouilles des pelleteuses;
avec l'INRAP, il observerait et étudierait de près excavations et remblais des
chantiers de démolition ou de constructions nouvelles.
...
aux environs des anciens thermes...
Idem
pour le chantier à l'ancien Couvent (EHPAD Saint
Joseph)
Voir la page
netcomete d'anciens bâtiments
Charles
Matthis est enterré au cimetière communal de Niederbronn.
Puisse son
esprit passionné continuer à veiller encore longtemps sur la ville et nous
guider !
Je
dédie cette page à l'haguenologue André
Wagner,
Et à l'ingénieur archéologue
toulousain d'origine alsacienne, Daniel Schaad, spécialiste européen en numismatique
romaine,
qui a dirigé les fouilles menant au trésor d'Eauze unique en France
(Musée
d'Eauze).
Merci de m'avoir initiée aux joies de l'archéologie, il y a trente ans, notamment
via le chantier d'Ehl et le Palais du Rhin.
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